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Interprétations Plastiques

Jean-Baptiste-Camille_Corot_-_Orphée.jpg

COROT Jean-Baptiste, Orphée ramenant Eurydice des enfers, 1861,

Huile sur toile, 112x137cm, Houston, Etats-Unis, Museum of fine arts.

En 1861, Jean-Baptiste Corot (1796-1875) livre sa version du mythe d'Orphée intitulée Orphée ramenant Eurydice des Enfers. Cette huile sur toile de dimensions 112x137cm aujourd’hui conservée au Musée des Beaux-Arts de Houston aux Etats-Unis, représente ce que l’on appelle le moment fécond du mythe, le moment où l’histoire est sur le point de basculer et d’adopter toute sa portée morale :  le moment où Orphée se retourne, croise le regard d’Eurydice et la perd pour toujours. 

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Avant tout, le peintre permet au spectateur d’identifier le mythe en représentant Orphée avec sa lyre et sa tunique à l’antique, comme c'est le cas pour sa femme Orphée qui de plus porte un voile transparent sur sa tête, pouvant rappeler le voile de la mariée et ainsi permettant au spectateur de comprendre également grâce au contact physique entre les deux qui ils sont.

Or, Corot ne se contente pas de représenter les deux amants mais aussi de les représenter en train de fuir les enfers, qu’il peint en arrière plan. En effet, de l’autre côté de la rive, les arbres sont presque effacés et moins distincts que l’arbre juste derrière Orphée qui la souligne et attire l’attention du spectateur en créant un rappel de format. Des femmes en arrière plan, il ne reste que les silhouettes qui se rattachent ainsi à Orphée qui semble n’être qu’un fantôme à la peau laiteuse qui disparaîtra dans un instant. Un contact visuel avec Orphée la privera du monde des vivants qui semble si près d’eux, mais placé en hors champ, puisqu’on remarque la présence du vent dans la tunique d’Orphée.

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Corot choisi ici de représenter le moment le plus important du mythe, le moment fatal. Cependant, il y introduit une poésie en mettant en scène le monde des morts de manière très aérienne et non pas horrible comme il est d'usage. 

Death_of_Orpheus_by_Émile_Lévy_(1866).jp

LEVY Émile, La mort d'Orphée, 1866, huile sur toile, 206x133 cm,

Paris, musée d'Orsay.

L’œuvre présentée ici est une peinture d’Émile Lévy (1826-1890), peinte à l’huile sur toile en 1866 et mesure 206 x 133 cm. Elle est conservée au musée d’Orsay à Paris et se nomme La mort d'Orphée.

Elle représente le moment de la mort d’Orphée par les bacchantes. Peu d’œuvres représentent ce moment précis où Orphée va se faire démembrer par les bacchantes. Cette œuvre présente donc Orphée, allongé au sol, les yeux à demi fermés, on ne sait pas s’il est déjà mort, juste inconscient ou si le chagrin de la mort d’Eurydice l’empêche de voir ce qui lui arrive. Les bacchantes qui l’accompagnent sont au nombre de onze, mais par le haut du tableau s'ouvre un paysage hors champ pouvant laisser penser que d'autres peuvent arriver à tout moment.

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D’ailleurs, le paysage représente une forêt avec des arbres morts et très peu de végétation à avant-plan. Les personnages sont concentrés sur le terrain vague du premier plan, de plus, on peut apercevoir au fond à gauche, une statue placée sur une tombe, aucune inscription ne nous permet de savoir quelle personne est enterrée ici, mais on peut supposer qu’il s’agit d’Eurydice.

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Les expressions des visages sont très étranges, surtout ceux des bacchantes qui ne représentent absolument pas la fureur qu’elles éprouvent face au désintéressement d’Orphée. Elles ne semblent pas en colère mais plutôt sereines à commettre leur crime. Les quatre bacchantes du fond semblent même danser, trois d’entre-elles se prennent la main, comme pour faire une ronde. Une dernière bacchante, près de la tombe semble s’amuser à danser près de celle-ci, comme une provocation faite à Orphée. Deux autres, à droite du tableau paraissent faire des gestes symbolisant le sacrifice divin, comme l’une des bacchantes tient une sorte d’idole. La deuxième semble être la plus importante des bacchantes puisqu’elle porte une robe bleue qui la démarque des autres et elle porte aussi un serpent. Un autre animal est aussi présent, c’est un léopard et il se tient près de la bacchante qui tient une sorte de liane en guise de fouet, et près de la tête d’Orphée. Cet animal symbolise deux choses : il représente le léopard faisant parti du cortège de Bacchus et nous permet d’identifier les femmes présentes, mais il symbolise aussi le fait que lorsque Orphée ne joue pas de sa lyre, les animaux redeviennent sauvages et menaçants.

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De plus, il faut remarquer une caractéristique sur la lyre d’Orphée. Selon la version d’Ovide, la lyre d’Orphée, cadeau d’Apollon, possède neuf cordes, comme les neufs muses dont l’une d’elle, Calliope serait la mère du poète. Or, ici, la lyre ne possède que six cordes, dont deux d’entre elles sont cassées.

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De même, seule la bacchante au centre du tableau possède une arme, une faucille, pour démembrer le poète. Orphée d’ailleurs, semble loin, ne tient pas rigueur de ce que les bacchantes compte lui faire. Peut-être se doute-t-il qu’au moins, dans la mort, il retrouvera sa bien-aimée pour l’éternité.

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La peinture en elle-même représente un moment assez fort et cruel du mythe d’Orphée, celui de son démembrement, or, le peintre a choisi de ne pas choquer son public, il choisit de représenter le moment juste avant que les bacchantes se mettent en action. Orphée ne semble pas souffrir, aucune trace de blessure n’est présente, on pourrait même se demander comment les bacchantes ont réussi à mettre le poète au sol. La peinture reste donc très évasive et soft quant au traitement que va recevoir Orphée dans quelques instants.

Pour aller plus loin...

Sources

- TomBraining, “Corot-Orphée ramenant Eurydice des enfers”, 7 décembre 2013 [en ligne] https://www.youtube.com/watch?v=CvHj_VDA_iw (consulté le 25 avril 2020).

 

- FICHAUX Sandro, “Orphée ramenant Eurydice des enfers”, 6 mars 2016, La Dissertation, [en ligne] https://www.ladissertation.com/Art/Histoire-de-l%27art/Orphée-ramenant-Eurydice-des-enfers-238413.html (consulté le 26 avril 2020).

 

- AGUILLON Catherine, “Orphée et Eurydice, personnages mystiques”, 5 novembre 2013, Aperto blogo, [en ligne] http://aguillon.info/2013/11/05/orphee-et-eurydice-personnages-mythiques/ (consulté le 25 avril 2020).

 

- CELLIER Leon, “Le Romantisme et le mythe d’Orphée”, 1958, Cahiers de l’AIEF, p.138-157 [en ligne] https://www.persee.fr/doc/caief_0571-5865_1958_num_10_1_2128?q=corot+orphée (consulté le 25 avril 2020).

 

- GOETZ Adrien, “COROT JEAN-BAPTISTE CAMILLE - (1796-1875)”, Encyclopædia Universalis [en ligne] http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/camille-corot/ (consulté le 25 avril 2020).

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- OVIDE, Les Métamorphoses, livre XI [en ligne] : https://bastideenlettres.files.wordpress.com/2019/09/la-mort-dorphc389e.pdf, (consulté le 7 avril 2020).

 

- Musée d’Orsay, Emile Lévy, Mort d’Orphée, [en ligne] : https://www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/notice.html?nnumid=003642, (consulté le 8 avril 2020).

 

- Wikipédia, Emile Lévy, dernière modification 03 février 2020 [en ligne] : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89mile_L%C3%A9vy, (consulté le 8 avril 2020).

 

- AGUILLON Catherine, "La mort d’Orphée", publié le 20 mars 2014, Aperto blogo [en ligne] : http://aguillon.info/2014/03/20/la-mort-dorphee-3/, (consulté le 10 avril 2020).

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